La cafetière à piston : l’art du café à la française

Pour faire un bon café, il faut du café, bien sûr, mais aussi… une cafetière. Comme, par exemple, une cafetière à piston. Et un peu de patience. Et accessoirement, quelques conseils…


Cet article prend 11 minutes à lire et comporte 2658 mots.

Ma première expérience avec une cafetière à piston ne m’a pas laissé un souvenir impérissable. Enfin, disons que mes impressions suite à cette « dégustation » m’a éloigné d’elle pendant des années.

Mais c’était il y a fort longtemps, quand il y avait des loups à tous les coins de bois. Enfin peut être pas quand même. Mais c’était il y a une bonne vingtaine d’années.

Et puis un jour, quinze ans plus tard peut-​être, on m’a proposé un café. L’amateur que je suis n’a pu le refuser. Mais en voyant sur la table une French Press – l’autre nom de la cafetière à piston – le souvenir du café lavasse, insipide et tiède, plus infâme que le pire des cafés solubles, bu des années auparavant m’a fait craindre le pire.

Mais non. Les effluves subtiles du café fumant venaient chatouiller mes narines et éveiller tous mes sens. Comment expliquer une telle différence ?

Si vous avez lu mes articles sur la cuccumella ou sur la Bialetti, vous vous doutez de la réponse : une mauvaise préparation, un café ou une mouture pas adaptés à ce type de cafetière, une eau pas assez chaude, un temps d’infusion trop court… allez savoir. Mais il n’y a pas à remettre en cause la capacité de la French Press à délivrer un bon café.

Et c’est après avoir adopté non pas une, ni deux, mais trois cafetières à piston que je vais enfin vous en parler. Comme toujours, nous allons tout d’abord nous intéresser à…

L’origine de la cafetière à piston

Piston, quand il s’agit de la cafetière, est au singulier. Il ne faudrait pas confondre cafetière et cornet. Une cafetière à piston, un cornet à pistons. Bref, je me demandais où la placer, voila, c’est fait.

Pour autant, l’origine de la cafetière à piston n’est pas aussi évidente que celle de la cafetière napolitaine, ou que celle de la Bialetti.

Bon, c’est un français qui l’aurait inventée, mais on ne sait trop qui et on ne sait trop quand.

La première cafetière à piston est peut-​être apparue en France sous une forme rudimentaire : un morceau de métal perforé ou un coton à fromage fixé à une tringle et que l’utilisateur peut introduire dans une bouilloire.

Wikipédia

Il y a bien un brevet déposé par un certain Marcel-​Pierre Paquet dit Jolbert en 1924, mais en 1852 déjà, deux autres français avaient déposé avant lui un brevet pour un appareil qui semble lui aussi être l’ancêtre de la cafetière à piston.

Puis en 1929, les Italiens Attilio Calimani et Giulio Moneta brevètent un modèle assez proche de la cafetière que nous connaissons. Et pour finir, après l’avoir modifiée et améliorée, le Suisse Faliero Bondanini dépose un dernier brevet en 1958 et lance la production en France où elle connaîtra rapidement le succès sous le nom de cafetière Melior, mais on la connait aussi sous l’appellation Bodum, du nom de l’entreprise qui a racheté le fabricant historique.

Cette cafetière est d’ailleurs connue sous diverses appellations : caffettiera a stantuffo en Italie (traduction littérale de cafetière à piston), coffee Press ou French Press aux États Unis, coffee plunger en Australie (où le café préparé avec la cafetière à piston est appelé, lui, plunger coffee). En Argentine et au Brésil, on parle de la cafetière française (respectivement cafetera francesa et cafeteira francesa) ou de French Press. Au Royaume-​Uni ou aux Pays-​Bas, c’est tout simplement la cafetière.

C’est donc d’une suite d’évolutions d’un modèle dont on ne sait pas même s’il a été produit ou pas, s’il a eu des précurseurs ou pas, qu’est née la cafetière à piston. Et à nouveau, les italiens sont de la partie. S’ils n’ont pas inventé ce modèle, ni ne l’ont popularisé, ils l’ont tout de même amélioré.

Les amateurs de café diront – à raison – que peu importe son origine, du moment qu’elle permet de préparer un café digne de ce nom. Et c’est bien sur ce point que nous allons nous attarder.

Mais avant de préparer votre premier café avec cette cafetière, il faut bien sur en posséder une. Voyons donc comment…

Bien choisir sa cafetière à piston

Pour bien choisir, il faut prendre en compte vos habitudes de consommation (tasse à café, verre, mug ou citerne), le nombre de personnes à servir et l’usage (si vous vous en servez une fois l’an, à l’occasion ou au quotidien).

Il existe trois matériaux de base pour un pichet de French Press :

  • le verre (du borosilicate plutôt, qui résiste aux hautes températures)
  • le plastique, pour un usage nomade essentiellement
  • l’acier inoxydable – il s’agit le plus souvent de cafetières isothermes

Le verre et l’inox ne dénatureront pas le goût de votre café, contrairement au plastique qui parfois peut déranger les palais les plus fins.

À vous de choisir en fonction de vos besoins, et éventuellement du design des modèles que vous trouverez.

Le matériau, c’est une chose, mais il y a un deuxième point important à considérer à l’achat : la contenance.

Même si vous pouvez réduire les doses pour préparer moins de café que la quantité prévue initialement, il y a une limite : il faut pouvoir descendre le piston et bloquer le marc de café.

Autrement dit, dans une cafetière 10 tasses, on peut sans problème en préparer 6. Mais pour en préparer une seule, mieux vaudra choisir une cafetière prévue pour deux à trois tasses.

Considérez aussi vos habitudes : la tasse type est de 12ml, si vous prenez un mug de café le matin, un modèle 4 tasses suffira à peine à vous préparer un mug unique. Si vous êtes deux…

Ne pensez pas quantité de café quand vous lisez 1 litre sur l’emballage ou dans la description. C’est la contenance du pichet, il faut déduire l’espace occupé par la mouture. On sera donc plus proche de 800ml que du litre.

Dernier point à considérer lors de l’achat : le filtre. Difficile de constater de visu la sa finesse lors d’un achat en ligne, et quoi qu’il en soit, vous ne pourrez que rarement tester son « adhérence » aux parois de la cafetière. Or, c’est cette adhérence qui retient toutes les particules de café au fond de la cafetière. Et donc, toutes les cafetières à piston ne se valent pas.

Préférez une marque reconnue à la qualité éprouvée telle que Bodum ou Espro (à double filtre) plutôt que d’économiser à tout prix quelques euros, à moins que vous ne destiniez votre cafetière à la décoration de votre pièce – dans ce cas, toutes les extravagances sont permises.

Les meilleures cafetières à piston

Les cafetières Bodum et Espro tiennent le haut du pavé, avec le modèle Chambord pour Bodum et la P3 pour Espro.

Ma Bialetti Preziosa me donne entière satisfaction, et je ne suis apparemment pas le seul à l’apprécier vu qu’elle obtient une note de 4,5/5 sur Amazon, avec plus de 2500 évaluations.

Meilleur marché mais qui ne démérite pas, vous avez la Caffettiera de Bodum. La différence majeure entre la Chambord et la Caffettiera, c’est le couvercle : en inox pour la première, en plastique pour la seconde.

Ces quatre modèles existent en 3 et 8 tasses, pour s’adapter à votre usage.

Pour ceux qui n’ont pas de moulin, Peugeot a inventé la cafetière à piston avec moulin intégré, la Paris Press. Une cafetière au design agréable, en borosilicate avec armature en inox, et un moulin tout spécialement adapté à ce type de cafetière (mais il n’est pas exclusivement réservé à la French Press, il peut également moudre très fin).

Peugeot Paris Press
Peugeot Paris Press

Les marques et modèles à éviter

Comme toujours, je vous déconseille les cafetières sans marque, vous y trouverez le meilleur et le pire, mais plus souvent le pire que le meilleur – alors que vous pouvez avoir une Bodum Caffettiera ou Brasil à prix très raisonnable.

La marque Le Creuset propose une cafetière à piston atypique, en céramique. C’est une jolie cafetière (assez chère d’ailleurs) mais malheureusement, elle ne supporte pas la comparaison avec les modèles précités. Le marc de café n’est pas suffisamment retenu lors de la descente du piston, en cause le jeu trop important entre le piston et les bords de la cafetière.

Elle semble en outre plus fragile que les modèles en verre, et la garantie de dix ans ne s’applique pas aux accidents domestiques.

La préparation du café avec une French Press

Pour ne pas répéter l’erreur de ma charmante hôtesse qui m’a éloigné de cette cafetière pendant plus d’une décennie, commençons par l’essentiel : le café.

Avant de lancer une infusion, n’oubliez pas que le temps de préparation de ce café est assez long. Plus long qu’avec une Moka Express, mais un peu moins qu’avec une cafetière napolitaine.

On n’est pas dans une préparation minute avec une dosette et une machine à capsules (je ne critique pas, j’ai même utilisé ce type de machine fut un temps, je constate juste la différence).

Un détail qui a toute son importance pour certains : le café préparé avec une cafetière à piston n’est pas adapté à la confection d’un capuccino. Vous obtiendrez tout au mieux un café au lait, à ne consommer que sur prescription médicale, en cas de force majeure.

Le café pour une cafetière à piston

Comme toujours, je vous recommande de prendre votre café en grain, un arabica de préférence. Côté torréfaction, le dark roast italien n’est pas le plus indiqué pour l’infusion, même si, personnellement, j’apprécie les arômes et saveurs délivrés par cette torréfaction dans une French Press. La torréfaction la plus adaptée à cette cafetière semble être la robe de moine, mais certains lui préfèreront une torréfaction plus claire.

Il faut moudre relativement gros, pour que le filtre en inox retienne la totalité de la mouture. Trop fine, vous auriez du marc de café au fond de votre tasse.

Broyez la quantité dont vous avez besoin au dernier moment. Le café perd rapidement ses arômes, c’est pour cette raison (en plus de la nécessité d’avoir une mouture grossière pour ce type de cafetière) que l’on préfère le café en grain au café moulu.

Le moulin à café n’a pas à être aussi précis, aussi régulier et n’a pas à délivrer une mouture fine : un modèle d’entrée de gamme suffira, pour peu qu’il soit solide.

Si vous ne voulez pas vous encombrer d’un moulin, demandez au torréfacteur une mouture adaptée.

La quantité de café est fonction de la contenance de votre cafetière : pour une 10 tasses, comptez de 75 à 85 grammes de café (soit de 7,5 à 8,5 grammes par tasse), dosage à moduler selon votre goût – plus il y aura de café, plus votre breuvage sera corsé – et en tenant compte du type de café que vous avez sélectionné.

L’eau pour votre café

L’eau, je le rappelle, est le composant principal du café. Prenez une eau de source ou une eau filtrée plutôt que l’eau du robinet.

Il ne faut pas la porter à ébullition, la température idéale est aux alentours de 90°C (de 90 à 93°C). Si vous n’avez pas une bouilloire à température programmable, attendez 30 secondes après avoir porté l’eau à ébullition pour faire légèrement baisser la température.

Les quantités d’eau et de café

La plupart des experts s’accordent pour un ratio de 1:12 à 1:14 (une dose de café pour 12 à 14 doses d’eau, soit par exemple 25 grammes de café pour 350 millilitres d’eau).

L’infusion du café à la française

Eh oui, on ne parle plus de percolation ou d’extraction, mais d’infusion. Le café comme un thé.

On se rapproche du « cupping » (des grains broyés grossièrement, infusés dans une tasse), la méthode utilisée par les baristi et les torréfacteurs pour goûter leurs cafés et en découvrir tous les arômes, toutes les saveurs, toute la complexité, et éventuellement tous les défauts.

Versez lentement l’eau sur la mouture, en remuant doucement avec une cuillère ou une spatule. Couvrez la cafetière avec le piston, sans appuyer.

Laissez infuser de quatre à cinq minutes. Ajustez le temps d’infusion à votre goût. Un café trop infusé sera plus amer, mais révèlera davantage la complexité du café. Il y a un équilibre à trouver, et il diffère d’un café à l’autre, d’une personne à l’autre.

Filtrez en enfonçant lentement le filtre dans le corps de la cafetière. Une fois le filtre permanent descendu au maximum, vous pouvez servir et déguster.

Expérimentez pour ajuster

Je vous ai donné des lignes directrices, mais vous pouvez tenter avec une mouture plus ou moins fine, une torréfaction plus ou moins avancée, un temps d’infusion plus ou moins long, jouer sur la température de l’eau, le ratio eau/​café… pour obtenir un café savoureux, à votre goût – le meilleur café, c’est bien entendu le meilleur pour vous, peu importe ce qu’en disent les autres.

Le service en tasse

Pour une dégustation réussie, ne laissez pas le café dans la cafetière à piston trop longtemps ; au contact du marc de café, l’amertume se développe rapidement, même après avoir abaissé le piston.

Il est préférable de verser la quantité restante dans une carafe ou un mug isotherme. Votre boisson restera chaude et conservera toute sa saveur.

L’entretien de votre cafetière à piston

Il n’y a pas grand chose à faire… pas de détartrage, pas de nettoyage en profondeur, juste – après chaque utilisation – dévisser le filtre de son support pour éliminer la mouture résiduelle, laver à l’eau savonneuse (chaude) toutes les parties de la cafetière et rincer, avant de laisser sécher.

Utilisez un goupillon si vous n’atteignez pas le fond de la cafetière, et n’oubliez pas que le verre casse parfois, et qu’un verre peut coûter aussi cher, voire plus cher qu’une cafetière complète.

La préparation d’un Cold Brew avec une French Press

Ayant apprécié le Cold Brew – autant j’aime un café chaud en hiver, autant je le préfère froid voire glacé en été – j’ai voulu tenter l’expérience avec une cafetière à piston. Essai transformé, le Cold Brew à la française est excellent.

Tout ce que vous avez à faire, c’est de verser de l’eau à température ambiante sur votre mouture, au lieu de la verser chaude.

Couvrez, oubliez votre cafetière au réfrigérateur, et 24 heures plus tard, votre café est prêt. Il suffit de presser avec le piston, et de transvaser dans une carafe.

Vous pouvez déguster un café froid à la saveur douce, long en bouche, sans acidité ni amertume, avec une teneur en caféine supérieure à celle d’un espresso ou d’un moka, et même d’un café filtre.

Vous pouvez relancer l’opération si vous êtes, comme moi, grand consommateur.

Mon avis sur la cafetière à piston

Malgré ma première expérience catastrophique, je suis adepte de la cafetière à piston ! J’en ai même trois, c’est vous dire… une Bodum 4 tasses pour mon café du matin, une Bodum 6 tasses et une Bialetti 8 tasses dont je me sers quand je reçois ou pour préparer mon Cold Brew en été.

Peu d’entretien, encombrement minimum, simple à utiliser, indépendante du mode de chauffe de l’eau, pour un café très aromatique… un indispensable pour tout amateur de café. Et vous, allez vous tenter la French Press ?

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